Télérama Hors série 09/2016 | Et ils changèrent le vin en vert (lien désormais inactif sur le site de Télérama)
Travailler la vigne est un métier âpre, solitaire. Pour tenir le coup et combler un vide, une nouvelle génération de viticulteurs bio jurassiens a décidé de faire du vin autrement, en mutualisant matériel, clients et expériences.
Les derniers rayons du soleil irradient les six hectares de vignes alignés devant nous. La vue est idyllique : à l’est, une plaine inondée par la lumière du couchant, qui s’étend à perte de vue vers la Bresse ; à l’ouest, les premiers plissements de la chaîne du Jura, teintés d’un rose éphémère. C’est là, sur la commune de Poligny, au cœur de l’étroite bande de soixante-dix kilomètres de long sur à peine six de large du vignoble jurassien, que Valentin Morel produit ses vins.
Gueule d’ange, le jeune vigneron de 28 ans, après un passage fugace dans l’administration, a engagé il y a trois ans une conversion du domaine familial, passant d’une agriculture conventionnelle au tout biologique. En nous frayant un chemin parmi les rangs emplis d’une herbe dense, il parle « reconquête », « prise de risque », « biodiversité » ou encore « techniques culturales simplifiées » (TCS). Inspiré par l’agronome japonais Masanobu Fukuoka, chantre d’une agriculture naturelle, débarrassée d’engrais et de pesticides, Valentin en a embrassé la philosophie et l’applique désormais au quotidien dans ses parcelles, branché en continu sur France Culture. « D’où une fâcheuse tendance à tomber amoureux des productrices », plaisante-t-il. Son domaine s’appelle d’ailleurs Les Pieds sur terre, en hommage à l’émission quotidienne de Sonia Kronlund.
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